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Sois belle et tais-toi de Marie Gray

Sois belle et tais-toi de Marie Gray (Éditions Guy St-Jean)

Mylène a tout pour être heureuse. Des enfants épanouis, un entourage aimant, un bon emploi, son petit confort et, surtout, Stéphane, sa « deuxième chance au bonheur ». Parfait papa de remplacement pour ses enfants, mari attentionné, beau bonhomme, c’est assurément un « homme à femmes », avec ses qualités et ses travers. Mais bon… personne n’est parfait, n’est-ce pas?


À coup de commentaires plus ou moins subtils, Josée et Cynthia tentent de lui démontrer que certains de ses comportements ne sont peut-être pas aussi inoffensifs qu’elle le croit, mais Mylène tarde à saisir les signaux d’alarme provoqués par l’attitude parfois douteuse de son chéri.


Arrive le jour où les remarques de Stéphane ne sont plus aussi drôles. Qu’est-ce qui a changé, au juste? Lorsque son monde éclate, trop de réalités deviennent aveuglantes: ce qui est acceptable, ce qui ne l’est plus.


Comme à tant d’autres avant elle, on a dit à Mylène: subis sans riposter, tolère sans te rebeller.


Sois belle et tais-toi.


Désormais, se taire n’est plus une option.


Je me souviens la première fois que j’ai lu ce roman. Je ne l’ai pas lu correctement pour une raison : j’étais en mode « oui, mais les hommes eux ? ». J’étais en pleine correction de mon roman concernant ces messieurs. J’avais passé la dernière année dans les statistiques, les recherches, les témoignages. À chaque publication « metoo », je disais « oui, mais les hommes eux? ». Ce ne sont pas des mensonges, c’est ce genre de publication qui m’a fait écrire mon premier roman. Alors, quand j’ai lu le roman de Marie Gray, je l’avais aimé, mais pas compris. Je n’étais pas dans la mentalité à ce moment-là de comprendre les subtilités qui se trouvaient nichées entre les mots.


Si tu n’as pas lu ma critique sur la série jeunesse « Oseras-tu », je te conseille de t’y rendre pour y trouver une biographie centrée sur sa carrière en tant qu’auteure pour adolescents. J’ai terminé mon adolescence avec les romans de Marie Gray, car j’étais dans le public cible. En effet, la série Oseras-tu a été publiée à la fin de 2012 et j’avais dix-sept ans. Lorsque le dernier tome à ce jour est sorti en 2016, j’étais au Cégep et mon amie, du même âge et qui lisait la série en même temps que moi, s’était précipitée pour l’acheter. Pourtant, en 2016, nous avions vingt-et-un ans. Ça prouve qu’il n’y a pas d’âge pour les livres jeunesse. Mais, l’année d’après, en 2017, l’auteure sort son roman « Il était une voix » dont j’ai eu la joie d’aller au lancement. Moi, j’ai eu du plaisir, à écouter Marie chanter sur scène, partager cette fierté, mes pieds un peu moins, car, anecdote cocasse, j’étais tellement gênée que je laissais passer tout le monde dans la file de dédicaces. J’ai été la dernière, à 22h, les pieds en sang dans mes talons hauts. Ah non, mais qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour une auteure qu’on aime ! (et surtout vive l’anxiété sociale haha) C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que j’étais une adulte et que je pouvais « switcher » dans le genre. Car comme j’ai dit dans mon autre critique, Marie Gray est connue principalement pour ses romans érotiques. Je l’avoue, je n’ai pas encore acheté l’intégrale des histoires à faire rougir, alors qu’il est vingt dollars. Pourquoi ? Parce que j’ai oublié de le mettre dans ma commande de juin. Oui, lancez-moi des pierres ! Je n’ai même pas la trilogie des Baisers ! En vrai, pour une fan, je fais dur ! Mais quand, en avril 2019, l’auteure a publiée Sois belle et tais-toi, j’ai sauté dessus. Écrit en pleine période du mouvement « #metoo, #moiaussi, #balancetonporc », l’auteure nous sert une bonne dose de féminisme sous une forme de réflexion. Ainsi, plus d’une année plus tard, je vous offre la critique de ce bijou de notre littérature bleue.


Comme j’ai dit au début, moi, le féminisme, je ne sais pas trop où j’étais à ma première lecture. À ma deuxième, je crois que j’étais beaucoup plus nuancée dans ma tête. Je me considère plus comme une égalitariste qu’une féministe et je ne m’en cache pas. Et je l’avoue, quand j’ai commencé ma lecture du roman, j’étais comme le personnage de Mylène. Cette femme dans la quarantaine qui prend conscience, peu à peu, que ce qu’elle a toujours subi et accepté n’est pas normal. Je l’ai fait. Et toi, si tu es une femme, tu l’as fait aussi. Là, je sais, si tu es un homme et que tu lis ça tu vas dire « Bon, ça y est ». Mais c’est vrai. Au début du roman, le personnage de Sophie énumère tout ce qu’une femme peut faire instinctivement pour se protéger et j’en ai parlé à un ami qui ne comprenait pas pourquoi on faisait ça ou qui n’avait pas remarqué. On est élevée pour faire attention, être attentive, à se protéger.


Qui parmi vous, mesdames les lectrices, avez-vous déjà fait semblant de parler au téléphone en marchant dans la rue ? Tenu vos clés dans votre paume de main si fort que ça en a laissé une trace, lorsqu’il faisait noir dehors et que vous étiez seule ? Êtes incapable de lâcher votre verre des yeux dans un bar, même pas une mini seconde, au cas où ? Vous, messieurs les lecteurs, avez-vous déjà fait ces actions ? Parce que moi oui. Probablement qu’une femme de votre entourage aussi. Demandez-leur.

Marie Gray expose ces comportements dans son roman avec une aisance déconcertante. Elle a compris des choses que moi-même n’avais pas comprises. Ces commentaires, que Stéphane fait sans cesse à sa femme, qui paraissent normaux, mais qui sont dégradants. En exemple « ça te fait une petite taille, cette jupe-là », comme si sans cette jupe, Mylène a une grande taille et est grosse. Le fait que son mari depuis dix ans reluque les « pitounes » et veut absolument que sa femme se fasse refaire la poitrine. Bien entendu, la quarantenaire veut reconquérir son époux et raviver la flamme, mais les réflexions coupent un peu son envie. Ces commentaires qui passaient ne passent plus. Il est macho et complètement désagréable. Cependant, je crois que le personnage est un peu « too much » quand on le lit et on se doute facilement de son sort à la fin, c’est évident depuis presque le début, même. Je dis qu’il est too much, mais en fait, non. J’ai connu un « Stéphane » dégueulasse. Qui aime les jeunes. Qui pousse les adolescentes à se faire un chum pour être « heureuse » et arrêté de faire le « bébé gâté » pour faire passer la « passe d’adolescente ». Qui faisait des commentaires sur l’apparence et sur la stupidité des femmes. Un vrai gros macho qui a été élevé comme un homme des cavernes et qui croit être l'empereur suprême face au "sexe faible" que nous sommes. Nous sommes des servantes là pour les assouvir. Alors, je dis que le personnage de Stéphane est caricaturé, mais pas du tout. Ce genre d’homme existe.


Tous les personnages exposent quelque chose à leur manière. Mylène apporte une vision différente en parlant de ses deux enfants, Corinne et Antoine. Sans hésiter, je sais que l’auteure s’est inspirée des deux amours de sa vie pour expliquer le rôle de mère de son personnage et de ce qu’elle veut inculquer à ses enfants, autant dans la vraie vie que dans la fiction. Elle veut qu’Antoine respecte les femmes et que Corinne n’ait pas à avoir peur des hommes. Et surtout, qu’elle ne se taise jamais.


Sophie et sa mère apportent le conflit de la famille lorsque l’homme qui fait partie de leur vie est un être épouvantable et abject qui est prêt à manipuler tout le monde pour atteindre à ses fins.


Josée est la féminazi du livre. Oui, je vais utiliser ce terme. La sœur de Mylène est extrême. Même moi qui comprenait tout le roman, parfois, j’avais envie de crier après Josée et de lui dire « tu exagères ma vieille ! ». Je sais que c’est probablement moi le problème, car je ne suis pas… comment dire… totalement consciente de tout ce qui se passe. Je laisse encore passer beaucoup d’affaires en disant que « ce n’est pas grave ». Je crois tout de même que le personnage est légèrement caricaturé, mais encore là, beaucoup de femmes sont comme Josée. (Et je parle du genre de femmes qui disent que la fête des Pères cause du tort aux mères monoparentales par exemple [Oui, ça existe]) Vous voyez ce que je veux dire ?


Mais, je crois que mon personnage coup de cœur reste Mylène, juste parce que j’ai appris en même temps qu’elle. Je me suis posé les questions en même temps qu’elle. J’ai réagi en même temps qu’elle. J’ai vraiment eu l’impression de grandir dans une expérience, guidée par une femme qui a beaucoup d’expérience.


Quant à l’histoire, elle est fluide, agréable à lire, les flashbacks sont bien placés pour imposer des éléments qui sont importants à la compréhension du présent. Ce que j’adore aussi de Marie Gray, c’est son écriture. Ce n’est pas une écriture qui se force à être « traditionnelle et conservatrice ». Elle sort des sentiers battus, elle écrit comme elle parle, avec ses québécismes et sa culture dans le sang. Elle n’hésitera pas à utiliser les majuscules et faire vivre ses mots. En fait, je crois que le mot clé est là : vivre. Les romans de l’auteure nous font vivre des émotions, c’est vrai, mais elle fait vivre ses pages, ses paragraphes, ses personnages, tout vit au fil de notre lecture. Peut-être est-ce à cause de la proximité avec le langage utilisé ? Probablement. Mais elle a le talent pour rentrer dans ton esprit et te faire réfléchir, autant que te titiller.


Parce que pour titiller, elle titille ! Sois belle et tais-toi reste considéré comme un roman érotique, puisqu’il comporte plusieurs scènes de sexes. J’ai beaucoup apprécié le fait que ces scènes étaient utilisées et non pas pour remplir l’histoire avec de l’érotique simplement pour le plaisir. Mylène, très ouverte sur sa sexualité va comprendre beaucoup de choses sur sa personne et sur celle de son mari, à travers le sexe. Bien sûr, ça stimule, c’est normal, c’est de l’érotisme. Même si c’est un genre que je connais peu et lis peu aussi, je suis quand même dans la possibilité de dire que c’est agréable à lire de temps en temps. Et dans le roman, la quantité de ces scènes étaient juste parfaites.


Le seul défaut que j’amènerai au roman est le côté un peu prévisible qui se pose à quelques endroits, mais aussi la fin. Je l’ai trouvé un peu rapide à mon goût. Pas mauvaise, mais un peu rapide. J’ai également trouvé que les personnages l’avaient « facile » à la fin. Dans le sens que tout leur tombe dans les mains. Je crois que c’est le seul commentaire négatif vraiment que j’aurais à faire.


En général, ce roman est une pépite. Autant par son fond que sa forme et il fait réfléchir. Du moins, il m’a fait beaucoup réfléchir et quand j’ai terminé ma lecture, la première pensée que j’ai eue était : toutes les femmes doivent lire ce livre. Puis, après, je me suis dit : non. TOUT LE MONDE doit lire ce livre. Femmes, hommes, ou autres genres qui se sentent inclus doivent lire ce livre. Je crois que c’est vraiment important.


Sachez que le roman est disponible en papier, numérique, mais également en audio. Cliquez sur la photo pour accéder au site de vente.


Note finale :


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