Au dernier souffle du printemps, une jeune femme disparaît à Montréal. Des semaines plus tard, elle est retrouvée morte, à des kilomètres de chez elle, ses vêtements soigneusement pliés près de son corps. Consultée par son ami détective pour l’assister dans son enquête, Clara Robinson, psychologue judiciaire aux pratiques marginales, a la certitude que le démon responsable de ce crime odieux n’a pas assouvi complètement son fantasme.
Le futur lui donne raison lorsqu’un fermier tombe sur un deuxième cadavre, abandonné dans le même secteur. Étrangement, les victimes sont découvertes dans une forêt où, vingt-huit ans plus tôt, trois jeunes se sont volatilisés sans laisser de traces.
Dans la région, il existe une légende : celle d’un grand fou claudiquant dans les bois, assoiffé de vengeance. Serait-il l’auteur de ces meurtres sordides ? Dans l’ombre de ce dernier se cache le petit fou, terrifié par ce que pourrait être la vérité. Et si le terrible secret qu’il porte en lui-même pouvait tout expliquer ?
CRITIQUE
Attention, la critique comporte d'énormes Spoilers. À lire à vos risques.
En toute transparence... je vais le dire franchement, j'ai passé un très mauvais moment. Et j'ai tellement de choses à dire que je sais que je risque d'en oublier. Justement, comme j'avais fait une énorme critique sur Goodreads, j'ai copier coller pour le blogue et c'est en faisant un copier coller de la C4 que j'ai réalisé que j'avais effectivement oublié un élément : la "légende d'un grand fou claudiquant dans les bois assoiffé de vengeance"... il n'y a pas ça. Genre pas du tout. Y cherchent un suspect, mais c'est pas mal ça. Donc en plus de tout le reste qui n'allait pas, on a ça en plus.
En vrai par où commencer ? Le manque de réalisme, le manque d'information, le manque de logique, les "déductions" sur rien de tangible, les suppositions qui sortent de nulle part, les découvertes qui tombent par hasard, presque par magie ou par le simple principe que c'est une histoire inventée entre les mains des enquêteurs, la plume, la profileuse que j'avais envie de frapper à coup de pelle dans le front, les règles du genre policier et l'impossibilité de trouver le coupable.
Et avant qu'on me dise : mais le thriller n'est pas un roman policier, je vous copie colle une définition. Le roman policier recouvre beaucoup de types de romans, notamment le roman noir et le roman à suspense ou thriller.
Donc je vais y aller par ordre des règles non respectées.
1- Première règle du roman policier selon S.S Van Dine : Le lecteur et le détective doivent avoir des chances égales de résoudre le problème. Non-respecté.
L'enquêteur du nom de Pierre nous cache des informations assez cruciales... pendant 50% du roman. La profileuse garde un secret jusqu'à la fin de l'histoire, que même son collègue lui reproche. Comment voulez-vous que le lecteur puisse avoir une chance d'élaborer des théories ou découvrir l'identité du meurtrier s'il n'a pas toutes les cartes en main ? C'était tout simplement impossible de se bâtir une théorie.
2- Cinquième règle du roman policier selon S.S Van Dine : Le coupable doit être déterminé par une série de déductions et non pas par accident, par hasard, ou par confession spontanée. Respecté à 50%.
Il y avait tellement de hasard et de déductions sur rien de tangible. Par exemple, un des enquêteurs fait le tour des animaleries pour savoir si un client, âgé dans la 40ène, a acheté du gravas d'aquarium (trouvé dans le corps des victimes). Après plusieurs animaleries, l'enquêteur discute avec une employée qui lui dit que rien ne lui vient en tête selon la description qui lui est donnée et de demander au livreur s'il a plus d'information. Tout de suite, l'enquêteur appelle son collègue avec une révélation ! Le meurtrier est un employé d'animalerie ! Et c'est par cette déduction (fausse by the way) que ça les mène sur la trace d'un individu... dont ils reçoivent le portrait robot parce que la sœur d'un suspect était cachée dans la chambre et a entendu l'interrogatoire et tenait à parler aux policiers. Et c'est grâce à ce portrait robot que de fil en aiguille ils tombent sur l'identité du meurtrier. Pour moi c'était comme si un bout de tissu avait été trouvé sur la scène de crime et qu'ils avaient assumés que le meurtrier travaillait dans une usine de textile pour finalement avoir spontanément une déclaration d'une voisine fouineuse. Rien. de. tangible.
3- Dixième règle du roman policier selon S.S Van Dine : Le coupable doit toujours être une personne qui ait joué un rôle plus ou moins important dans l'histoire, c'est-à-dire que le lecteur connaisse et qui l'intéresse. Charger du crime, au dernier chapitre, un personnage qu'il vient d'introduire ou qui a joué dans l'intrigue un rôle tout à fait insuffisant serait, de la part de l'auteur, avouer son incapacité de se mesurer avec le lecteur. Non respecté.
En lisant le livre, j'ai écris à mon amie ce message : J’suis rendu à 60% et no joke j’ai zéro théorie. Y’a tellement peu d’indices que j’ai aucune osti d’idée. Soit ça va être un retournement avec des infos qu’on avait pas qui vont me faire lacher wtf? ou un personnage fucking pas rapport qui va me faire lâcher wtf? ou fucking prévisible… pis still a wtf
La raison pour laquelle c'est sous spoiler est simple, je vais gâcher votre fun et peut-être faire sauver du temps à ceux qui ne sont pas dérangés par les spoilers. Le meurtrier se trouve à être le bully du "petit fou" qui est mentionné une fois par son nom (voire deux) au début du roman et a également prit l'identité d'un homme qui a découvert le cadavre au début du roman, mentionné lui aussi une fois. Donc, un dude qu'on a complètement oublié rendu à la fin du livre, car absolument RIEN ne menait dans sa direction, parce qu'on avait ZÉRO information sur le gars à part que c'était un bully en 1996.
Je suis totalement sérieuse. Quand son nom est dévoilé, j'ai lâché un "qui?" et j'ai dû faire une recherche dans mon livre numérique. C'était aberrant. Et frustrant. Décalissant.
Tout les indices (et il y en a pas beaucoup, j'ai eu l'impression de lécher des miettes tout le long de ma lecture) recueillis pour "démasquer" le coupable... bah ils servent absolument à rien parce que justement, on sait rien du coupable. Il est aquariophile parce qu'il fait manger du gravier d'aquarium à ses victimes ? bof hein. Passionné d'astronomie, d'accord, mais comment voulez-vous qu'on sache que le dude était passionné d'astronomie, quand on l'apprend EN MÊME TEMPS que son identité ?
4- Douzième règle du roman policier selon S.S Van Dine : II ne doit y avoir qu'un seul coupable, sans égard au nombre des assassinats commis. Toute l'indignation du lecteur doit pouvoir se concentrer sur une seule âme noire. Non respecté.
Eh bah non, un autre truc raté. On apprend dans le dernier chapitre qu'un des meurtres n'a pas été commis par le "démon".
5- Quinzième règle du roman policier selon S.S Van Dine : Le fin mot de l'énigme doit être apparent tout au long du roman, à condition, bien entendu, que le lecteur soit assez perspicace pour le saisir. Je veux dire par là que si le lecteur relisait le livre, une fois le mystère dévoilé, il verrait que, dans un sens, la solution sautait aux yeux dès le début, que tous les indices permettaient de conclure à l'identité du coupable et que, s'il avait été aussi fin que le détective lui-même, il aurait pu percer le secret sans lire jusqu'au dernier chapitre. Il va sans dire que cela arrive effectivement très souvent et je vais jusqu'à affirmer qu'il est impossible de garder secrète jusqu'au bout et devant tous les lecteurs la solution d'un roman policier bien et loyalement construit. Il y aura donc toujours un certain nombre de lecteurs qui se montreront tout aussi sagaces que l'écrivain. C'est là, précisément, que réside la valeur du jeu. Non respecté.
Comme je l'ai dis plus haut, il y a eu beaucoup de hasard et aucune information tangible pour trouver le coupable. Même en relisant le livre, c'est à la limite de l'impossible, je dirais même, j'affirmerai en fait, que c'est impossible. Les enquêteurs tombent sur l'identité réelle du coupable quasiment par chance. Sans la déclaration de la sœur cachée dans la chambre, ils n'auraient jamais eu de portrait robot qui aurait été reconnu par un des enquêteurs qui les aurait mené à la maison de la grand-mère qui aurait dévoilé l'identité du tueur en même temps qu'un personnage soi-disant mort qui ne l'était pas finalement.
6- Seizième règle du roman policier selon S.S Van Dine : II ne doit pas y avoir, dans le roman policier, de longs passages descriptifs, pas plus que d'analyses subtiles ou de préoccupations « atmosphériques ». De telles matières ne peuvent qu'encombrer lorsqu'il s'agit d'exposer clairement un crime et de chercher le coupable. Elles retardent l'action et dispersent l'attention, détournant le lecteur du but principal qui consiste à poser un problème, à l'analyser et à lui trouver une solution satisfaisante. Bien entendu, il est certaines descriptions que l'on ne saurait éliminer et il est indispensable de camper, ne fût-ce que sommairement, les personnages, afin d'obtenir la vraisemblance du récit. Je pense, cependant, que, lorsque l'auteur est parvenu à donner l'impression du réel et à capter l'intérêt et la sympathie du lecteur aussi bien pour les personnages que pour le problème, il a fait suffisamment de concessions à la technique purement littéraire. Davantage ne serait ni légitime ni compatible avec les besoins de la cause. Le roman policier est un genre très défini. Le lecteur n'y cherche ni des falbalas littéraires, ni des virtuosités de style, ni des analyses trop approfondies, mais un certain stimulant de l'esprit ou une sorte d'activité intellectuelle comme il en trouve en assistant à un match de football ou en se penchant sur des mots croisés. Respecté à 50%
Et c'est là que je vous parle de la plume et de la profileuse. Je vais commencer par la plume. En soi, c'est une plume agréable, si on lit un roman psychologique ou de la littérature blanche. Dans un roman policier, c'était lourd, très lourd. L'utilisation de mots soutenu, de longues métaphores, de longues descriptions alourdissait le texte et m'éloignait de l'enquête.
Voici un exemple.
"Comme tous les matins, assise devant son thé aussi noir que la nuit, Clara joint ses mains pour se recueillir au nom des jeunes femmes disparues. Alors que l'air pénètre dans sa trachée et gonfle ses poumons, elle concentre son esprit sur chacune de ces âmes perdues, imaginant les traits de leur beau visage, autrefois vivant et épanoui. Elle les cherche dans les limbes, avide d'indices qui lui auraient passé sous le nez."
L'utilisation du mot Sparadrap pour parler de tape aussi m'a choqué. Ou encore que le coupable, littéralement décrit comme "con comme un balai" utilise le mot importuné. C'est peut-être moi qui exagère, mais le gars est décrit comme quelqu'un de pas très intelligent à l'école, ni même tout court, à part sa fixation pour les étoiles. Je le vois mal dire à quelqu'un "importuné".
Puis la profileuse. Clara. Oh comme je l'ai haï. Sa présence m'exaspérait au plus haut point. Déjà, j'avais du mal avec le fait qu'elle "sentait l'odeur du démon", c'est-à-dire, l'odeur du coupable. C'est à la limite de la règle 14 qui est : La manière dont est commis le crime et les moyens qui doivent amener à la découverte du coupable doivent être rationnels et scientifiques. La pseudoscience, avec ses appareils purement imaginaires, n'a pas de place dans le vrai roman policier. Comme Clara mentionne l'ésotérisme et va même jusqu'à fermer les yeux en marchant sur une scène de crime pour "suivre l'odeur du démon", on est pas trop dans le scientifique et le conventionnel. Mais, comme je sais que des médiums ont été utilisés pour de vraies enquêtes et que les profileurs ont leurs propres méthodes, je laisse une chance à cette règle.
Le problème avec Clara... c'est qu'elle ne savait rien pentoute. Elle cochait des cases, affirmait des choses sur rien de tangible (encore!). Elle s'est trompé de nombreuses fois. J'avais l'impression qu'elle avait coché toutes les cases possibles et quand une se révélait vrai elle était comme "j'avais raison!". Mais elle s'est trompé sur la raison du corps de Chloé dans le champs. Sur le corps masculin découvert. Sur le côté aquariophile du meurtrier, à part aimer la rivière, il était pas mal plus attiré par la forêt. Elle sautait toujours aux conclusions rapidement et plusieurs de ses déductions vont juste avec les statistiques de tueur en série. Ah, aussi, en parlant du terme. Clara affirme, à la découverte du deuxième cadavre, celui de Chloé, qui n'est pas présenté de la même manière que celui de Tracy, le premier cadavre au début du roman, qu'ils ont affaire au même tueur et que c'est un tueur en série. Mais, ils n'ont la confirmation qu'après les analyses pathologiques. Même si elle a eu raison (en même temps, le livre fallait bien qu'il se construise sur quelque chose...), elle assumé sans preuves devant elle. Et dire que c'est un tueur en série à deux cadavres, bah non. C'est minimum trois. N'importe quel passionné de true crime et de policier connait cette information. Donc pour une profileuse...
Tout ça m'amène finalement à mon dernier point qui n'a pas rapport avec les règles du policier : le manque de réalisme et d'informations.
Je l'admets, le roman contient des détails scientifiques précis sur certaines choses, comme au niveau pathologique. Mais j'ai eu du mal avec beaucoup de choses.
Principalement Alexie qui est décrite comme épileptique qui, suite à ces nombreuses crises, commence à entendre des voix. Je précise : pas des sons, des voix. Elle a des hallucinations auditives claires. Ce n'est pas impossible, mais après plusieurs recherches sur ce symptôme, ma foi, peu connu, j'ai découvert que les crises doivent être causés à un endroit précis du cerveau et que ce sont souvent plus des sons que des voix claires. Est-ce qu'Alexie était également schizophrène et que ses crises épileptiques ont fait surgir ses symptômes ? Peut-être, on ne le sait pas, l'auteure ne l'a pas expliqué.
Ensuite, les policiers. Lors de la disparition de Gabrielle et leur prise de déposition des membres de la famille, on a un dialogue d'un policier qui les rassure en disant qu'après 24 heures, normalement, la personne est retrouvée. Non, aucun policier ne dit ça. C'est faire de faux espoirs à la famille pour rien, car chaque cas est différent. Ensuite, ils décident d'aller fouiller l'endroit où Gabrielle a été vu pour la dernière fois par sa sœur... en dernier. Encore là, disons que ce n'est pas habituel.
Tout ça mélangé avec les miettes d'indices qui nous sont servis tout au long du récit. Entre les différents point de vues (dont il fallait deviner que certains se passaient en 1996 et d'autres en 2024, ça aussi c'était super), on avait des informations au compte goutte. Des informations qui se révélaient fausses. Des informations inutiles. Du "suspense" qui mène à rien. Parce que faire croire vers la fin du livre qu'un des policiers pourrait être coupable, alors qu'il n'y a absolument rien de logique à croire cette voie (et qu'en plus ça briserait la quatrième règle et y'en a déjà beaucoup de brisées). Et si vous vous attendez à du thrills, principe même du thriller, vous n'y trouverez absolument rien. Aucune sensation forte, aucune prise à la gorge, aucun stress, aucun plaisir à élaborer une théorie, parce qu'il n'y a pas assez d'information pour s'en bâtir une.
En somme, vous comprendrez avec ce très long avis que ce livre est, pour moi, un échec dans le genre policier.
Ah pis by the way, on a même pas la satisfaction de voir le coupable vivre avec sa conscience ou être jugé, parce qu'il se tranche la gorge au moment où il se fait arrêter. Allez savoir comment il avait accès à son couteau après qu'on lui ait lu ses droits...
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