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Nées autres de Stéphanie Perron

Nées autres de Stéphanie Perron (Éditions 3 Sista) – Image par Orbie

Lorsque je me suis rendue sur le site de Gai écoute, j’ai eu un choc en apprenant qu’il n’y a rien à faire pour me guérir. Pas de vaccin, pas de pilule, pas de remède, nothing ! On naît comme ça. On vit avec. Moi qui croyais à un problème de santé mentale réglable en cinq rencontres chez le psy. Je ne serai quand même pas lesbienne pour le restant de mes jours ?


Je vis d’insomnie et de boissons énergisantes. Je pleure tous les soirs et ça perdure. Comment sera ma vie si je ne peux pas changer ? Comment c’est, vivre dans la peau d’une lesbienne ? Pénible. Déprimant. Problématique. Sans chum, ni mariage ni enfants.


Sans famille.


J’ai quatorze ans et je sais déjà que ma vie sera un enfer.


Stéphanie m’a parlé de ce livre alors qu’on était dans un groupe d’écriture. À l’époque (oui, oui), Corde raide n’était même pas publié encore ! Alors, lorsqu’elle a annoncé une levée de fond pour aider Yvan Godbout en mettant en vente son roman, j’ai tout de suite su ce que j’avais à faire. Pour moi c’était une pierre deux coups. J’encourageais une amie avec sa toute première oeuvre et j’aidais une personne au passage. Sachez que vous pouvez soutenir Yvan juste ici : http://soutenonsyvangodbout.com/collectedefonds/ ! C’est également la première (et probablement la seule) critique un jeudi !


[Petit Disclaimer : Oui, je connais personnellement l’auteure, ça ne m’empêche pas de faire une critique objective et d’évoquer des points négatifs. Merci de votre compréhension!]


Pour la biographie de l’auteure, je vous renvoie à la critique de Corde raide. Sachez cependant que son roman « Les Damnés : Portalington » est en prévente dès le 15 août et en librairie dès le 14 septembre. Si vous lisez cette critique dans deux mois, désolés.


Plusieurs romans sur l’homosexualité ont paru sur nos tablettes durant les dernières années, mais à mon avis : pas assez. L’autre problème étant que lorsque plusieurs pensent aux textes sur l’homosexualité, ils pensent aux gays, délaissant les histoires sur les lesbiennes. C’est un manque important dans notre littérature et j’ai été ravie d’avoir la chance de lire ce roman-ci où on suit l’histoire de Rachel et Gabrielle. Stéphanie Perron raconte dans son tout premier roman une partie de son histoire. Celle de son adolescence, de son coming out, de ses angoisses et de ses accomplissements.


J’ai été très surprise de découvrir le personnage de Rachel qui comporte plusieurs similitudes avec l’auteure. Par leur style et leurs goûts. Stéphanie, comme son personnage, sont fans de jeux vidéo, mais aussi de musique, une autre chose qui prend beaucoup de place dans la vie de Rachel et l’aide à passer par-dessus des épreuves déroutantes, dont celle de vivre sous le toit de parents homophobes. Je rassure les possibles lecteurs : c’est un côté qui ne fait pas partie de la vie de l’auteure, elle a des parents charmants et ouverts d’esprit !


Quand on commence le récit, on retrouve en premier lieu Rachel comme narrateur, ce sera par la suite Gabrielle, mais je vais revenir là-dessus plus loin. On rencontre le personnage pour la première fois en direction d’un cours où des intervenants vont venir parler d’un organisme pour aider les gens dans la communauté LGBTQ+. À l’époque du roman, soit en 2014, on parlait de LGBT tout simplement et l’organisme VIE s’inspire fortement du NÉO, un organisme qui tenait (et tiens!) à cœur à l’auteure. Bref, Rachel au début de l’histoire est homophobe. Oui, sur le coup j’ai été surprise, mais au fil du temps, on comprend que c’est l’ignorance qui la rendait aussi aigre envers la communauté gay et lesbienne. En fait, c’est une des choses que j’ai adorées du roman. Les personnages apprennent, ils ne sont pas parfaits. L’ignorance, on peut s’en sortir, sauf si on est borné et con comme les parents de Rachel. On peut voir la vie différemment, comprendre différemment et c’est ce que Stéphanie a montré avec ses personnages, autant Francis, que Rachel, que Gabrielle que leur entourage.


Les personnages d’Émilie et Audrey étaient agréables à un moment, mais plus on avançait dans l’histoire, plus j’avais de la difficulté, surtout avec Émilie. Je comprends le fait qu’elle soit prise dans quelque chose de plus grand qu’elle et que Rachel n’était pas facile à vivre, mais quand tu es amie depuis aussi longtemps avec quelqu’un, j’aurais aimé qu’elles essaient de comprendre le mal-être de leur amie au lieu de lui tourner le dos. J’aurais bien aimé savoir ce qu’elles sont devenues.


Un autre côté un peu plus négatif dans le côté de Rachel, ce sont les répétitions. Olivier « à marde » n’a plus que ce qualificatif, c’est drôle les 2-3 premières fois, après c’est un peu plus lourd. Également le « Calm down Rache » est surutilisé, mais j’ai plus vu ça comme un « motto » pour ne pas faire de bêtises. En même temps, c’est un premier roman et l’auteure a appris de ses erreurs si on compare Nées autres à Corde raide, donc je dis : tant mieux !


La personnalité de Rachel et son amitié avec Francis sont les gros plus du roman dans son entièreté. J’adore leur complicité, leurs ressemblances et comment ils foncent dans leur nouvelle réalité en tant que personnes homosexuelles en visitant ensemble VIE qui prendra une place importante de leur vie.


Ce qu’il faut comprendre de Nées autres c’est que ce n’est pas qu’un roman jeunesse qui parle du coming out. Oui, il y en a, mais c’est surtout un livre qui parle d’une quête de soi, une quête identitaire, une quête au bonheur. Ce que l’auteure a voulu montrer avec son roman, ce ne sont pas les difficultés du coming out, bien qu’elle en parle, mais plus les difficultés à être heureux. Une phrase de son livre résume parfaitement l’histoire et c’est : « Vivre une vie heureuse en étant homosexuelle est difficile, mais pas impossible. » C’est magnifique et ça sensibilise beaucoup. Ce qui est plaisant avec Rachel et Gabrielle c’est que, oui, elles sont lesbiennes, mais on peut s’identifier à leur introspection et leurs réflexions même en étant bisexuels ou hétéros. Ça donne un plus à l’histoire.


Pour terminer la partie de Rachel, je dirais que la partie où elle avoue son homosexualité a été celle qui m’a le plus remué. C’est une montagne russe entre l’inquiétude, l’anxiété, la colère, la tristesse. On espère pour le personnage que ses parents seront compréhensifs, mais ce sont de grosses mardes d’homophobes qui mériteraient la pendaison. Être homophobe par ignorance, c’est poche, mais ça arrive. Être homophobe malgré la connaissance, c’est être une grosse marde. J’ai eu beaucoup de mal avec les parents de Rachel pour cette raison. J’ai été même déçu qu’elle accepte de les voir une deuxième fois après son départ. La première fois était, à mon avis, déjà de trop !


Pour la partie deux, on retrouve Gabrielle, une jeune fille de secondaire quatre qui est aussi prise dans ses réflexions et ses questionnements, car elle a un kick sur Rachel avec qui elle travaille chez Videotron (RIP les Videotron).


Je l’avoue j’ai eu un peu plus de difficulté avec la partie deux qu’avec la partie un. Elle m’a moins marqué. L’écriture est certes plus mature, mais j’ai trouvé Gabrielle plus « enfantine » pour une raison qui m’échappe. Peut-être parce que Rachel a maintenant dix-neuf ans, ça fait un décalage ? Je ne sais pas. Bref, Gabrielle est différente de Rachel, car elle est sportive oui, mais aussi parce qu’elle a une vision face à l’homosexualité différente. Elle est mal à l’aise de prendre position pour les relations homosexuelles, de peur d’être ridiculisé ou persécuté dans son équipe de basketball. C’est compréhensible, mais triste en même temps.


Kérianne était plus agréable qu’Émilie et Audrey, mais j’aurais voulu la savoir plus différente. J’avais l’impression de retrouver les deux autres filles en une seule. Il manquait un petit humf à ce sidekick selon moi. Mais elle était quand même plus à sa place, ce qui a ajouté quelque chose de bien à la partie deux.


La sœur de Gabrielle, Lydia est un gros coup de fraicheur. J’ai vraiment adoré sa présence, surtout à la fin (et oops la petite incohérence qui la fait apparaître soudainement ! ça m’a fait rire parce que je ne comprenais pas !). Sa compréhension et son aide ont apporté toute la différence dans le coming out de ce deuxième narrateur. C’est vraiment comme un enrobage de chocolat sur une fraise sucré ! Comparaison étrange, mais c’est quand même ça !


Je dirais que ce qui m’a déplu le plus de cette deuxième partie c’est le côté un peu plus « quétaine ». J’adore Rachel et Gabrielle ensemble, elles sont mignonnes, mais leur aveu de sentiment s’est fait vraiment trop précipiter à mon goût et leur relation a une ambiance de fleurs et de chocolats, alors que c’est le contraire des personnages ! Je dois tout de même avouer que leur premier baiser est absolument adorable !


Le coming out de Gabrielle était plus plaisant que celui de Rachel et j’ai adoré le fait que plusieurs des personnages ont des réactions différentes. Comme m’a dit Stéphanie un jour : « ce n’est pas que blanc ou noir », en effet, il y a des gens qui acceptent l’homosexualité sans la comprendre et inversement. J’aime beaucoup la mère de Gabrielle qui était perdue, pas totalement contre, pas totalement pour, elle essayait juste de comprendre sa fille, mais doute à cause de son propre vécu, elle essaie de l’aider, mais ça sort toute croche. C’est un personnage qui réagit gris, car au début, elle ne croit pas sa fille et pense que c’est une passe, alors que non.


La fin est très belle, mais j’aurais aimé un peu plus. Qu’en est-il de VIE ? Y vont-elles ensemble ? Et tous les autres personnages ? J’aurais aimé un plus gros « wrap up », mais les dernières phrases du livre sont vraiment cutes et ça m’a permis de fermer le livre avec un sourire.


Pour un tout premier roman, c’est très bon. Outre quelques problèmes avec les répétitions, le reste est de mon goût personnel. La majorité des défauts que j’ai trouvés à ce roman sont réglés dans Corde raide et dans son feuilleton, l’Aube des Damnés. J’ai très hâte de lire Portalington pour voir la maturité de la plume de l’auteure, plus de dix ans après l’écriture de Nées autres.


Prenez note que vous pouvez toujours vous procurez le livre via l'auteure. Envoyez-lui un message privé sur sa page d'auteure (ici) pour le lui demander. Les ventes vont directement à Yvan Godbout pour l'aider avec ses frais judiciaires injustes.


Note finale :


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